Colloque douanier ODASCE – Horizon douane 2030

09/12/2022| par Florence Blanchier| Douanes , Colloque , E-commerce , IOSS
Photo Colloque douanier ODASCE – Horizon douane 2030

Le seizième colloque douanier européen « Horizon douane 2030 - la voix des entreprises », organisé par l’ODASCE - qui célébrait ses 50 ans- a eu lieu les 23 et 24 novembre 2022 à Biarritz.

Plus de 420 personnes étaient présentes pour échanger autour de la thématique douanière. Parmi elles, la Direction Générale des Douanes et des Droits Indirects (DGDDI), l’OMD France, du groupe des sages de la DG Taxud (direction politique douanière à la Commission Européenne), les responsables douanes de grandes entreprises, des cabinets d’avocats, des Représentants en Douane Enregistrés et Commissionnaires de Transport, bref tout l’écosystème douanier pour échanger sur les enjeux douaniers à l’horizon 2030.

Puisqu’il faut faire un choix parmi les 4 tables rondes proposées le premier jour, toutes plus instructives et vertigineuses les unes que les autres, nous avons eu un faible pour la dernière intitulée « E-commerce : l’accélérateur du changement », animé par Catherine Amandio parce qu’elle concerne nos entreprises au quotidien.

Rappel des faits :
Douanièrement et fiscalement, l’e-commerce a été pendant longtemps dans une zone grise. En 1993, un colis provenant de Chine vers l’UE était associé à un envoi de particulier à particulier, donc en franchise de droit et taxes. Depuis l’arrivée du e-commerce, c’est l’inverse, nous sommes en présence d’une transaction commerciale ; d’où la mise en place du « Pack e-commerce » avec sa réglementation TVA du 1e juillet 2021 pour lutter contre la fraude fiscale au sein de l’Union Européenne. Depuis la mise en place du jeu douanier Delta H7, les importateurs express de marchandises inférieures à 150 euros bénéficient d’un traitement simplifié, c’est-à-dire d’une inscription à un guichet unique (IOSS – Import One Stop Shop).
C’est à partir de cette date que les marketplaces, jusqu’ici simples intermédiaires de commerce, deviennent redevables de la TVA, pour le compte des vendeurs qu’elles hébergent.

Les témoignages d'entreprises :
C’est dans ce contexte que sont intervenues la directrice de la politique publique sur les taxes et finances d’Amazon, Sophie CLAESSENS et Alison SOUANEF, responsable taxes de Vestiaire Collective, le Vinted du luxe.

Pour la première, ce ne sont pas moins de 1,5 millions d’importations qui sont concernées par le DELTA H7. L’effet pervers de cette simplification est la parcellisation des colis pour arriver en dessous du seuil de 150,00 €. Elle note également le manque d’harmonisation des seuils. S’il est porté à 150 € dans l’UE, il se monte à 800 $ aux Etats-Unis. Il faut donc jongler avec cette disparité des règles.

Pour Alison Souanef, c’est le business model tout entier qui n’entre pas dans le cadre de la réglementation. En effet, la marketplace qu’elle représente met en relation des particuliers. Si Delta H7 a évolué du B2B au B2C, le pack ne s’adresse pas encore au modèle C2C.

Ceci pose des problèmes récurrents : l’économie circulaire, portée dans les objectifs environnementaux des plus hautes instances, est pénalisée. Mourad Arfaoui, présent lors de la première table ronde (Vision et agenda institutionnel) a inscrit dans les objectifs de l’OMD de « verdir le SH », c’est-à-dire favoriser les produits « amis » de l’environnement. Quoi de plus « amis » que la vente de seconde main, même si cela concerne le luxe ? Dans cette zone sombre, quid des droits de douane et de la TVA qui ont déjà été payés lorsque le produit était neuf ? Le marché de la seconde main engendre en l’état une double taxation.

Ce manque de réglementation conduit à un autre problème, celui de leur relation avec les RDE au moment de la mise en libre pratique. Ils reçoivent des bijoux, des produits « bizarres ». Ils donnent un numéro de TVA pour autoliquider un produit qui n’appartient pas à l’entreprise.

En somme, même si la douane a rattrapé son retard vis-à-vis du e-commerce, l’économie circulaire revêt des dimensions qu’elle doit intégrer dans sa réflexion stratégique.

Quant à Olivier Tsalpatouros, directeur adjoint de la conformité au sein du groupe DPD, la difficulté vient de l’intérieur. Avec comme exemple tangible un nombre de 2,7 milliards de colis échangés dans l’UE, dont 12,8 millions échangés le 21 novembre 2021, la difficulté majeure vient du manque d’harmonisation dans les 27 Etats Membres. Son groupe a construit des hubs dans chacun d’eux pour mieux se conformer à la réglementation nationale, jusqu’à loger et former des douaniers dans leurs locaux dans certains pays de l’Est. Ils sont donc passés de déclarants en douane à donneurs d’ordre et représentants fiscaux.

A l’avenir, quelles sont les règles à mettre en œuvre ?
La première réponse, qui a d’ailleurs été le fil rouge des discussions tout au long de ce colloque, est d’améliorer la maîtrise des données. Dans une opération de e-commerce, beaucoup de données sont échangées entre beaucoup d’interlocuteurs sans savoir comment elles sont traitées, ce qui pose un problème de sécurisation.

Si l’on résume, une étape a été franchie le 1er juillet avec la mise en place du IOSS. Les intervenants ont été unanimes à prôner la sortie de la déclaration paquet par paquet. Il faut aller chercher les données vers les places de marché ou le vendeur.

4 idées se sont dégagées de la table ronde :
1. L’IOSS devrait être obligatoire dans tous les Etats Membres, de manière à clarifier toutes les opérations.
2. Accéder à une base de données par l’opérateur, afin de vérifier qu’il n’y a pas eu d’utilisation frauduleuse du numéro IOSS.
3. La demande de remboursement devrait être dématérialisée, ce qui éviterait à l’opérateur de venir avec ses milliers de dossiers papiers.
4. L’harmonisation des marchandises soumises à restriction et prohibitions.

Pour aller plus loin, il faudrait une référence par colis qui corresponde à la législation fiscale et douanière.

Il ne faut pas croire que la parcellisation va s’arrêter. Le marché unique est réellement unique. Il faut essayer de le préserver et même exporter le modèle. L’idée de Single Window est aussi à l’ordre du jour au Mercosur et ASEAN.

Auteur : Florence Blanchier

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